Témoignage écrit

À Saint-Barthélemy d'Agenais, Albert réside dans un immeuble composé de deux étages, situé tout proche de la halle, dont il occupe avec sa grand-mère, sa tante et Mme Alphonse SPITZ le rez-de-chaussée alors que le premier étage est destiné à la famille SCHOENI. Chaque personne dispose d'un lit, mais la cuisine est commune aux deux familles. Dans la cour arrière de l'immeuble est implanté un puits dont l’eau sert aux usages courants ; pour les usages alimentaires les familles utilisent l'eau de la fontaine municipale. Une boulangerie est juxtaposée à cet immeuble et des liens se tissent avec cet artisan qu’Albert accompagne régulièrement lors des tournées dans les villages et fermes voisines.

Albert assiste aux célébrations eucharistiques quotidiennes, aux vêpres les dimanches après-midi, en compagnie de la grande partie des réfugiés. Ayant dépassé l'âge normal de scolarité de 14 ans à l'époque, il n'assiste pas aux cours donnés à l'école par l'institutrice d'Urschenheim. Il se rend régulièrement dans la ferme VETTORETTI située à la sortie du village en direction de Puymiclan ; des liens d'amitiés se tissent avec les quatre des enfants de cette famille – Afra, Béatrice, Alfredo et Angelo. Durant la période des moissons, il participe au montage des gerbières, dont il ne connait pas les techniques ; il se rappelle que ces jours-là on lui sert une bonne soupe très tôt le matin avec une grande lampée de vin rouge pour terminer son assiette. Tous les soirs, il ramène de cette ferme du lait que lui offre généreusement cette famille. Il lui arrive également de rendre service à l’un ou l'autre agriculteur du village, à l'exemple du foin à rentrer avant un orage ; en fait, durant cette période ce sont souvent les épouses d'agriculteurs qui exploitent les fermes, leurs maris étant mobilisés.

Albert se souvient d'un billard dans le bistrot du village et des anciens qui jouaient aux cartes. Il se rappelle également de quelques randonnées en bicyclette pour aller rendre visite à des connaissances de villages voisins également évacuées dans la même région.

Des difficultés de communication sont évidentes à cette époque et dans ce contexte. De nombreux évacués ne parlent que le patois alsacien et ont des difficultés à se faire comprendre. Pour araser ces situations, sa tante qui parle le français accompagne régulièrement des personnes à l'épicerie ou chez les commerçants du village. L'absence du maire d'Urschenheim, qui est resté dans son village avec la commission de sauvegarde, se fait lourdement sentir. Albert nous dit que Gustave MULLER essayait bien souvent de gérer les situations au mieux. Les interventions régulières et appréciées du curé KUSTER vont dans le même sens. L'absence de nouvelles d'Urschenheim aggravait cette situation bien que plusieurs soldats démobilisés - à l'exemple de Joseph BLATZ, Albert HUCK, Ernest RINGLER, Georges MULLER ou Isidore DECKERT venus rejoindre leurs familles à Saint-Barthélemy d’Agenais - apportent quelques nouvelles d'Alsace ou d'ailleurs. Albert insiste sur les conditions particulières du moment : il n'y a pas de poste radio parce qu’il n'y a pas d'électricité et la presse écrite se trouve restreinte et limitée dans son contenu - ce qui peut paraître impossible à un jeune d'aujourd'hui.

Lors des préparatifs du départ de Saint-Barthélemy d’Agenais, la famille VETTORETTI aide les Alsaciens à charger les camions et autocars. Arrivés à Colmar, les réfugiés sont accueillis par un bon Eintopf pour rassasier leur faim, mais également par un discours nazi afin de les conditionner psychologiquement au nouveau régime politique.

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Le témoignage d'Albert TAGLANG en vidéo